(1905-1980)
Fils de paysans du département d’Alba, il fait des études secondaires à Blaj et à Orastie. Il finit les cours de la Faculté de Psychologie de Cluj-Napoca, après quoi il fait des études plus poussées aux Universités de Leipzig, Berlin, Hambourg, Paris et Londres. Récipiendaire d’une bourse Rockefeller (1934-1936), il choisit de retourner en Roumanie, bien que, durant son séjour aux Etats-Unis, on lui eût proposé un poste dans une université américaine. A Cluj, il est professeur à la Faculté de Philosophie et des Lettres (1926-1947) et directeur de l’Institut de Psychologie. Arrêté en 1948, il est condamné à 25 ans de travaux forcés, en raison du « crime de complot contre l’ordre social », après avoir refusé les postes diplomatiques que le régime communiste lui avait offerts. Au bout de 16 ans de prison (il est mis en liberté en 1964), il reprend à son propre compte l’activité de recherche et de publication, sans qu’il soit réadmis au sein du corps professoral roumain. Mémorialiste important. Invité à conférencier dans des universités d’Allemagne et des Etats-Unis.
« En 1964, il y avait énormément de gens qui étaient libérés de prison. Si on se rendait sur les quais de la gare, on voyait bien des gens qui y attendaient quelqu’un. On reconnaissait facilement ceux qui venaient de sortir de la prison : ils étaient pâles et ils avaient une sorte de sainteté, une émotion inouïe dans le regard. Ils regardaient les arbres, les feuilles vertes. Nous aussi nous attendions, sans que nous soyons sûr qu’il soit encore vivant. Puis vint le jour merveilleux où maman m’a appelé et ensuite j’ai entendu la voix de mon père. Au fond de moi, je ne croyais plus que mon père puisse jamais être de retour. Je l’espérais, mais, lorsque j’ai entendu sa voix, j’ai été si stupéfait, que j’ai cru vivre un miracle. Et alors j’ai pris la fuite vers la maison… Il était optimiste et il avait un peu peur qu’il ne soit renvoyé à domicile forcé… Il a été terriblement torturé.
Ce que papa racontait était émouvant : il disait que, après qu’il était sorti de la prison, tout le monde, que ce soit dans le train ou dans les rues, se rendait compte qu’il venait d’Aiud. Il n’espérait plus être accepté au sein de la vie sociale et alors il a demandé : « un balayeur, combien gagne-t-il? ». « Trois cents lei », on lui a répondu, ou bien je ne me rappelle plus combien, le salaire de l’époque. « Cet argent, suffit-il pour s’acheter du pain et du lait? » Il était revenu avec cette inquiétude, qu’il a, par ailleurs, longtemps gardée »
(le metteur en scène Nicolae Margineanu, en parlant de son père, le professeur Nicolae Margineanu ; fragment d’une interview conservée à l’Archive d’Histoire Orale du Centre International d’Etudes sur le Communisme – le Mémorial des Victimes du Communisme et de la Résistance)
Fiche d’incarcération: